Colloque international
Karène Sanchez Summerer
Universiteit Leiden
Clémentine Rubio
Université François Rabelais, Tours
Pour l’Italie et la France, la diplomatie culturelle en « Terre Sainte » s’est jouée en partie à travers leurs instituts culturels. L’institut Dante et le Centre de Culture Française participent en effet à la course à l’influence que se livrent Français, Italiens mais aussi Britanniques et Allemands au Proche-Orient durant les années 1930. Ces objectifs d’influence visent dans un double mouvement d’une part à toucher le public le plus large possible, au-delà de la clientèle traditionnelle de leurs écoles établies de longue date, et d’autre part à contrer les stratégies d’influence des autres puissances.
Dans le contexte politique tendu entre juifs et arabes de la Palestine mandataire, certains acteurs diplomatiques des années 1930 ont également évoqué des objectifs d’apprentissages interculturels avant la lettre. Dans une Jérusalem alors théâtre d’une cristallisation des tensions entre communautés arabes, juives et puissance mandataire pour obtenir l’autorité sur le territoire, ces instituts culturels entendent proposer une neutralité et une ‘rencontre des peuples’ autour de programmes où la culture joue un rôle particulier et entraîne des débats sur sa nature et son importance.
L’activité principale du CCF est clairement, d’abord, l’enseignement du français, perçu comme vecteur de diffusion de la culture et donc d’influence par une position officielle neutre qui permettrait de continuer à toucher à la fois le public juif et arabe, mais aussi à l’intérieur même de la population dite israélite, les juifs allemands et les séfarades. Le centre italien Dante privilégie lui la diffusion de la culture ‘classique’ sur celui de l’italien, tout en adoptant des objectifs plus complexes que ceux qu’entendent lui attribuer les diplomates fascistes. Les langues française et italienne se voit alors en concurrence inégale avec non seulement l’anglais mais aussi l’arabe et l’hébreu, et sont mises en compétition avec les autres langues secondaires.
Comment les centres culturels participent de cette diplomatie culturelle ? Quelle conception et quelle diffusion de la culture proposent-ils ? Quels sont leurs spécificités et les points communs ? Quelle est la place et la nature des contenus culturels de l’enseignement des langues française et italienne ?
La réflexion comparative que nous proposons concerne les différentes conceptions de la civilisation-culture et sa diffusion au Levant, et de manière plus générale, hors d’Europe. Les deux centres culturels seront aussi analysés par rapport à l’importance symbolique de l’ouverture du British Council à Jérusalem durant la même période.
L’intervention s’appuiera sur les archives diplomatiques françaises de Nantes, les archives du ministère des affaires étrangères italien, les archives romaines de la Dante Alguieri, les archives du British Council (Londres et Jérusalem).